Déjà emprisonné depuis mars, le maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, se voit désormais accusé d’« espionnage politique » — un chef d’inculpation taillé sur mesure pour étouffer toute opposition. Le rival le plus redouté de Recep Tayyip Erdogan paie cher son audace : avoir incarné, à Istanbul, l’idée qu’une autre Turquie est possible.
Le couperet est tombé une fois de plus sur Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul et cauchemar politique du président Recep Tayyip Erdogan. Déjà derrière les barreaux depuis mars, l’édile stambouliote se voit maintenant affublé d’un nouveau mandat d’arrêt pour « espionnage politique ». Rien que ça.
L’accusation, sortie tout droit du manuel des régimes autoritaires, prête à sourire — si la situation n’était pas aussi grave. D’après l’agence officielle Anadolu, Imamoglu aurait tenté de « lever des fonds de manière illégale » pour préparer sa candidature à la présidentielle de 2028, tout en cherchant un appui international pour « affaiblir l’État turc ». Traduction : il aurait osé exister politiquement hors du giron du pouvoir.
Depuis sa prison, Imamoglu riposte avec des mots de feu : “De telles calomnies n’effleureraient même pas l’esprit du diable !”, “Nous faisons face à une immoralité honteuse !”
Difficile de lui donner tort. Depuis des mois, le Parti républicain du peuple (CHP), principale force d’opposition, subit une chasse aux sorcières méthodique : destitution de sa direction provinciale, procès en rafale, campagnes de diffamation. Le message du pouvoir est limpide : quiconque menace l’ordre établi finira muselé.
Erdogan et ses alliés jurent que la justice est indépendante. On connaît la chanson. Pendant ce temps, la chaîne d’information Tele1, coupable de trop d’esprit critique, a été placée sous tutelle par l’État. Son rédacteur en chef, Merdan Yanardag, est à son tour visé par un mandat d’arrêt.
Et à Istanbul, la ville la plus peuplée de Turquie, le scénario se dessine déjà : une condamnation d’Imamoglu ouvrirait la voie à la prise de contrôle de la mairie par un gouverneur nommé par Ankara. Le suffrage populaire remplacé par la nomination.




