Ils l’ont fait. Ils ont vraiment osé. Enterrer un criminel de guerre avec plus de faste qu’un roi, et appeler ça des funérailles d’État. Nebojša Pavković, condamné à 22 ans de prison par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie pour crimes contre l’humanité au Kosovo – massacres, déportations, villages rasés –, est mort en détention en 2024. Et hier, la Serbie a décidé que ça valait une célébration nationale. Oui, une célébration.
À Belgrade, le spectacle était digne d’un film de propagande. Salves d’honneur, fanfare militaire, gerbes officielles. Le ministre de la Défense a même osé parler d’un « soldat qui a défendu la patrie ». Quant à Aleksandar Vučić, le président, il a brillé par son absence et son silence : une complicité discrète mais efficace. Pavković n’était pas un criminel, non, c’était un héros. Enfin, aux yeux de ceux qui n’ont jamais rencontré les victimes de ses ordres.
Au Kosovo, l’ironie se transforme en rage. « Ils osent enterrer avec gloire celui qui a ordonné le massacre de nos familles ? », s’étrangle Bekim Blakaj, directeur du Fonds humanitaire du Kosovo. À Mitrovica-Nord, des portraits de Pavković sont partis en fumée sur les trottoirs. À Pristina, le Premier ministre Albin Kurti a dénoncé une « réhabilitation officielle du génocide ». Pendant ce temps, l’Occident se contente de murmures diplomatiques : Human Rights Watch parle d’un « signal dangereux », Amnesty International regrette que « la Serbie piétine la mémoire des victimes », et l’UE appelle à « la retenue ».
Et alors, au bout du compte, le cercueil descend, la fanfare joue, les gerbes s’alignent… et le monde, lui, se félicite d’avoir respecté le protocole. Du grand art bureaucratique, à défaut d’humanité.






