Au Honduras, l’élection présidentielle de novembre 2025 s’est terminée dans le flou, les contestations ont été étouffées et le vainqueur couronné non pour son programme, mais pour être l’enfant chéri de Washington. Nasry Asfura, élu avec moins de 27 000 voix d’avance, incarne la continuité d’un système où la démocratie se plie aux intérêts américains.
Le 30 novembre 2025, le Honduras a voté… ou du moins, il a simulé le suspense. Trois semaines plus tard, après dépouillements interrompus, chiffres bricolés et procès-verbaux triturés à la main, le Conseil national électoral a enfin désigné un vainqueur. Nasry Asfura, Parti national, 40,26 % des voix. Salvador Nasralla, 39,55 %. L’écart ? 26 348 bulletins. Suffisant pour un président, insuffisant pour croire à la légitimité.
Le flou a été roi. Pannes du site du CNE, corrections manuelles des procès-verbaux, irrégularités en cascade. Les contestations ont éclaté : manifestations, blocages de routes, dénonciations de « coup d’État électoral » par Rixi Moncada. Mais tout est rentré dans l’ordre. La consigne officielle : « acceptez ». Pourquoi ? Parce que le vainqueur est l’enfant chéri de Washington.
Donald Trump ne s’est pas contenté de regarder. Il est intervenu comme un arbitre de salon : dès le 2 décembre, il crie à la fraude et menace de couper l’aide américaine si Asfura n’est pas déclaré gagnant. Le 19 décembre, deux responsables du CNE pro-Libre sont sanctionnés. Entre-temps, Trump accorde une grâce à Juan Orlando Hernández, l’ex-président extradé pour narcotrafic. Le message est limpide : le choix de Washington n’est pas négociable.
Le Honduras est sous perfusion. Son économie dépend des transferts des migrants, sa sécurité de programmes américains, sa politique des arbitrages de Washington. Ici, un seul candidat est « acceptable » : Nasry Asfura. Prévisible, aligné, compatible. Peu importe que le processus soit bancal, les règles floues ou les accusations de fraude — tant que le résultat final plait à l’Oncle Sam, tout va bien.
Asfura, ancien maire de Tegucigalpa et entrepreneur du BTP, n’est pas un inconnu. Il est la continuité incarnée, celle d’un Parti national au pouvoir depuis des décennies, avec son lot de corruption, de narcotrafic présumé et d’autoritarisme de bon aloi. Pas de rupture, juste la stabilité rassurante que Washington adore.
Il hérite d’un pays divisé, méfiant, fatigué, avec un taux de participation de 58 %. Les discours sur la sécurité, la croissance et la lutte contre l’immigration clandestine reviendront, calibrés pour l’oreille de Trump et de ses alliés. Mais la vraie question reste : combien de temps peut-on gouverner un pays quand le pouvoir ressemble moins à un vote populaire qu’à une variable d’ajustement géopolitique ?
Le Honduras n’a pas seulement élu un président. Il a rappelé une vérité dérangeante : la démocratie, quand elle gêne les intérêts stratégiques, devient négociable. Et parfois, il suffit d’un tweet présidentiel pour que tout le monde s’incline.





