L’Algérie inscrite sur la liste noire de l’Union européenne

L’Union européenne vient d’inscrire l’Algérie sur sa liste noire des pays à haut risque en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Derrière ce coup de tampon technique, une claque politique : Bruxelles acte officiellement sa défiance face à un système jugé opaque, peu coopératif et dangereux pour la sécurité financière du continent. 

 

C’est un vote qui passe inaperçu à Alger, mais qui pourrait bien rebattre les cartes de ses relations avec Bruxelles. Le Parlement européen a ratifié l’inscription de l’Algérie sur la liste des pays tiers à haut risque en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Cette décision, adoptée à Strasbourg avec l’aval des députés européens, acte la méfiance croissante des institutions de l’Union envers les dispositifs algériens de lutte contre la criminalité financière. « Bonne nouvelle ! », s’est exclamée Laurence Trochu, députée européenne du groupe CRE (Conservateurs et réformistes européens), sur X. Une phrase lapidaire, mais lourde de sens pour les partenaires économiques de l’Algérie.

 

Contrôles renforcés, confiance fragilisée
Pour les institutions financières, les entreprises et les organisations européennes, toute opération impliquant des entités algériennes devra désormais faire l’objet de « mesures de vigilance renforcées ». Cela signifie un contrôle accru sur les flux financiers en provenance ou à destination de l’Algérie, une traçabilité renforcée des capitaux, un devoir de signalement immédiat en cas d’opérations suspectes. En somme, toute transaction passera désormais par un filtre de soupçon quasi systématique, alourdissant les procédures administratives, augmentant les coûts de conformité, et refroidissant potentiellement les investisseurs. L’acte officialisant cette inscription entrera en vigueur dans les prochaines semaines, à une date encore non précisée.

 

Selon plusieurs sources européennes, notamment des rapports techniques transmis à la Commission, le système algérien présenterait « de sérieuses carences », notamment sur trois volets jugés critiques : la traçabilité des flux financiers à l’intérieur du pays reste opaque, notamment du fait de la prééminence du secteur informel et de circuits de change parallèles très actifs ; la surveillance des ONG et associations, souvent utilisées comme vecteurs de financement détourné ou politique, est jugée déficiente, avec des contrôles lacunaires ; la coopération judiciaire internationale, enfin, reste lente et souvent entravée par des barrières politiques ou administratives, ce qui nuit à l’efficacité des enquêtes transfrontalières.

 

L’Algérie dans le mauvais camp des listes
L’Algérie rejoint ainsi une vingtaine de pays figurant sur cette liste noire européenne, aux côtés du Liban, du Venezuela, ou encore du Laos. Si des pays comme le Sénégal, le Panama ou les Émirats arabes unis en ont récemment été retirés, c’est qu’ils ont démontré des progrès notables, parfois spectaculaires, dans leur arsenal de lutte contre la criminalité financière. L’Algérie, elle, semble faire le chemin inverse.


Le message envoyé par Bruxelles est clair : le manque de transparence et de coopération de l’État algérien ne peut plus être ignoré. Et ce, alors même que des négociations complexes sont en cours sur les accords énergétiques, les flux migratoires, et les partenariats économiques euro-méditerranéens.

 

Pour les entreprises européennes — notamment françaises, espagnoles ou italiennes — opérant en Algérie ou en partenariat avec des entités algériennes, cette inscription pourrait complexifier l’accès au crédit, retarder certaines opérations, voire décourager de nouveaux investissements. Les banques seront tenues de soumettre toute opération à un examen minutieux. Et dans un contexte de tension persistante entre l’Algérie et certains États membres — dont la France — le risque de crispation est réel.

 

Réformer ou s’enfermer

Quant à Alger, aucune réaction officielle n’a encore été publiée, mais il est probable que cette inscription soit perçue comme un affront politique et une ingérence. La rhétorique anti-européenne pourrait s’en trouver renforcée dans les discours officiels.

 

Sauf révision rapide de sa position, l’Algérie devra réformer en profondeur ses dispositifs de surveillance financière, coopérer avec les instances européennes, et prouver sa volonté de se conformer aux standards internationaux. Une tâche ardue dans un État dont les rouages administratifs sont peu perméables à la transparence, et dont la gouvernance reste marquée par des logiques de contrôle plutôt que d’ouverture.

 

Dans l’intervalle, les ONG, les entreprises et les ressortissants algériens installés en Europe pourraient faire les frais d’une méfiance généralisée, y compris dans les secteurs les plus éloignés du financement illicite. En matière de diplomatie comme d’économie, la confiance est une monnaie rare. L’Algérie vient d’en perdre une partie.

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