Sahara Occidental : l’ONU à deux doigts d’entériner le plan marocain

À la veille du vote du Conseil de sécurité sur la MINURSO, une rumeur affole les chancelleries : Donald Trump aurait reculé sur son soutien au plan d’autonomie marocain, selon Algérie Patriotique. Aucune confirmation officielle. Derrière ce brouillard diplomatique, un basculement se profile : le projet américain enterre l’autodétermination sahraouie au profit du « réalisme marocain ».

 

Le 30 octobre, à New York, les diplomates vont se regarder dans le blanc des yeux. Le Conseil de sécurité de l’ONU votera sur le renouvellement du mandat de la MINURSO, cette mission censée — depuis 1991 — préparer un référendum d’autodétermination au Sahara Occidental. Trente-quatre ans plus tard, toujours pas de référendum, mais un territoire administré de facto par le Maroc, contesté par le Front Polisario, et soutenu à bout de nerfs par l’Algérie. Cette fois, le projet de résolution américain, distribué discrètement dans les couloirs du siège onusien, pourrait faire basculer la donne : il enterre le principe d’autodétermination au profit du plan d’autonomie marocain, présenté comme « réaliste et crédible ». En langage diplomatique, cela s’appelle un enterrement de première classe.

 

L’Occident vote marocain

Depuis que Donald Trump — toujours prompt à vendre la géopolitique au kilo de phosphate — a reconnu en 2020 la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental, Washington ne s’est jamais vraiment retourné. En août dernier, l’ancien président a remis une couche : soutien total à Rabat, « partenaire stratégique », « stabilité régionale », et tout le glossaire de circonstance. Derrière le lyrisme, un calcul brut : les ressources halieutiques et minières valent bien quelques contorsions juridiques.

 

La France suit, comme souvent, en fidèle compagnon de route. Paris juge désormais le plan marocain comme « la seule base sérieuse » pour une solution politique — une phrase qui, traduite du diplomatique, signifie : le référendum, c’est fini. Même Londres, autrefois adepte du ni-ni, a rallié la position marocaine en juin dernier, suivie par la Belgique, empressée de déclarer l’autonomie « crédible et réaliste » — l’expression magique qui ouvre les portes du Palais royal.

 

Moscou, l’arbitre décisif

Reste la Russie, éternel contrepoids dans la partition maghrébine. Officiellement, Moscou défend l’autodétermination. Officieusement, le Kremlin écoute les appels insistants d’Abu Dhabi et de Pékin, soucieux d’éviter un veto qui contrarierait Rabat — et accessoirement, ses contrats d’armement. Si la Russie s’abstient, c’est tout un pan de la diplomatie algérienne qui s’écroule.

 

Alger sur la défensive

L’Algérie, qui a fait de la cause sahraouie le cœur battant de sa politique étrangère, voit le sol diplomatique se dérober sous ses sandales. Un vote favorable à la résolution américaine consacrerait l’autonomie comme référence onusienne, reléguant aux oubliettes le référendum promis en 1991. Un revers majeur pour Alger, déjà affaiblie par une économie atone et une diplomatie engluée dans la rhétorique anti-coloniale.

 

Les cercles pro-marocains jubilent déjà : « l’Algérie a tout perdu », susurrent-ils sur les plateaux et les réseaux. Ce n’est pas faux. Si la Russie ne brandit pas son veto, Alger se retrouvera seule, isolée, et symboliquement désarmée. Le Polisario continuera surement de parler d’« occupation » et d’« illégalité internationale », mais le monde a depuis longtemps troqué les résolutions pour les contrats commerciaux.

 

La rumeur du recul américain : info ou intox ?

À la veille du vote, une rumeur circule : Donald Trump aurait reculé sur son plan d’autonomie, selon Algérie Patriotique. L’information, reprise sur quelques canaux pro-sahraouis, n’est confirmée nulle part. Aucun média crédible — ni Reuters, ni le Washington Institute, ni même la presse américaine — n’a relayé un tel revirement. Est-ce un réel rétropédalage ou une intox savamment orchestrée pour influencer les chancelleries, à la veille du scrutin ?

 

Un vote à haut risque

Le 30 octobre, les projecteurs du monde arabe seront braqués sur le CSNU. Si la résolution passe, ce ne sera pas seulement un vote technique, mais un séisme géopolitique. Le Maroc consolidera son influence africaine, adoubé par l’Occident. Au détriment de L’Algérie qui devra réapprendre à parler d’autre chose que de « décolonisation » pour justifier son rôle régional.

 

La MINURSO, censée organiser un référendum, se transformera définitivement en gardienne d’un statu quo légalement flou mais politiquement rentable. Le « réalisme marocain » aura triomphé — ou, selon le camp que l’on choisit, l’ONU aura acté l’enterrement de l’un des derniers dossiers de décolonisation au monde.

 

Et pendant que diplomates et communicants rédigeront leurs communiqués de victoire, dans les camps de réfugiés de Tindouf, les Sahraouis compteront une année de plus d’attente. Trente-quatre ans après la promesse du référendum, l’autodétermination ressemble de plus en plus à un mirage dans le désert.

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