Mexique. Diocèse de d’Apaztingá, à Michoacán. On est dimanche matin, le ciel est bas, il pleut, il fait froid. Devant le portail verrouillé, les fidèles attendent sous les gouttelettes. Enfin, voilà Père Alfredo Gallegos … venu dégager le passage. Il prend son temps. Regarde. Épie chacune des personnes presentes : un geste soupçonneux, un fidèle inconnu, un étranger… « Point pour impressionner ou soigner une angoisse injustifiée, dira-t-il plus tard, mais pour éviter le pire, devenu notre seconde religion ». A Michoacán, le pire ne vient pas d’un barbu trop pressé de rejoindre les 72 vierges, mais des Chevaliers des Templiers (Los Caballeros Templarios), un cartel de la drogue qui a fait de la région l’épicentre du trafic et de la violence. Ils s’attaquent à tous ceux qui dérangent leur juteuses affaires. Militaires, policiers, hommes de foi… Assassinats, fusillades, règlements de comptes…
C’est à cause de leur méfaits que Monseigneur Gallegos a bousculé toutes les règles de l’église. Lui qui fait honneur à la parole divine, il a décidé de ne plus jamais officier sans son pistolet. Un petit 7,65 soigneusement glissé le long de sa ceinture. Sous les yeux de la Vierge imperturbable. Il lui arrive même d’inviter les journalistes derrière l’autel pour montrer ce qu’il appelle « son trésor » : le vestiaire transformé en petite armurerie, capable de mettre toute une ville à feu et à sang. Mais lorsqu’on lui demande s’il a un permis de port d’armes, il répond avec un vague sourire : « Le regard du Seigneur me suffit ».