Philippe Schreck, député RN et avocat en exercice, n’a décidément pas peur de franchir les limites. Le jour même de la condamnation de Marine Le Pen pour malversations financières, il se lance dans une nouvelle provocation sur Facebook, s’attaquant directement aux juges qu’il qualifie de « mollahs du droit » et appelant à la révolte contre ce qu’il appelle la “dictature des juges”. Mais derrière ses attaques enflammées, qui est vraiment Philippe Schreck ?
À Draguignan, dans le Var, il n’est pas seulement un député ou un avocat, mais un produit d’un système où l’argent et le pouvoir dictent les règles. Son père ? Avocat. Son beau-père ? Ancien bâtonnier. Son ex-femme ? Avocate. Et sa fille ? Avocate en devenir. Bref, les Schreck, c’est la dynastie des justiciers, où la loi se soupe en famille, entre privilégiés.
L’impunité creuse l’appétit
C’est ce clan qui protège Schreck ? Lorsque des avocats ont vu 200 000 euros disparaître de leur caisse, le bâtonnier Schreck est resté indifférent, ignorant toute responsabilité, comme si cette affaire ne le concernait pas. Et quand la vérité a émergé, le clan Schreck a réagi dans la violence : insultes, menaces de mort, une pluie d’attaques débridées.
Mais visiblement, l’impunité, ça creuse l’appétit. Le voilà qui persiste, après la condamnation de Marine Le Pen : en moins d’une demi-heure, il déverse son venin sur la justice, comparant les juges à des terroristes qui piétinent la démocratie. L’appel à l’insurrection populaire est lancé, avec le risque d’un pays plongé dans la violence.
La véritable question demeure : cette fois, sera-t-il réellement confronté à la justice, malgré l’immunité parlementaire qui semble le protéger à chaque faux pas ? Les articles de loi, eux, sont prêts à le faire plier, à lui montrer la chaleur du bras de la justice : « Provocation à la rébellion », « appel à un rassemblement insurrectionnel », « injures publiques », « atteinte à une décision judiciaire »… Pour l’instant, pas de réaction du côté du Parquet.
Méthode de parloir
En attendant, à Paris, le Conseil national des barreaux a tenu à lui faire savoir de quelle justice il se nourrit : il a publié un communiqué « condamnant fermement » les attaques contre la Présidente de la 11e chambre correctionnelle du Tribunal de Paris. La même qui, par un coup de pinceau magistral, a mis fin aux mirages d’enrichissement facile du Rassemblement National.
Bien entendu, dans leur grande sagesse et avec la rigueur qu’on leur connaît, ils rappellent que les contestations doivent se faire « dans le cadre légal », et non comme dans un parloir de prison. Le message, bien évidemment, s’adresse également à Schreck, l’avocat apparemment perdu dans ses pulsions, sommé de respecter sa « robe » et la profession.
Un ton quasi professoral, comme si l’on parlait à un élève indiscipliné, conclut cette leçon de moralité avec l’indignation nécessaire : « Les menaces contre les magistrats constituent une atteinte grave à l’indépendance de la Justice, principe fondamental de l’Etat de droit ». Et non de l’Etat Islamique…
Voilà donc la position « intègre » de ceux qui, à Paris, croient encore aux valeurs de la justice. Et à Draguignan ? Que fera l’actuel Bâtonnier, Jérôme Brunet-Debaines ? Va-t-il saisir la commission de discipline de l’Ordre des Avocats ? Comment va-t-il réagir face à ce qui ressemble à une faute déontologique flagrante ? À quelques mois de la fin de son mandat, à la fin de l’année 2025, saura-t-il braver la violence verbale de Schreck et la tourner contre son propre système ?
Le silence est d’or
« Je n’y crois pas », tranche un ancien avocat, le seul à avoir accepté de parler. « Brunet-Debaines est sur le point de prendre sa retraite, et son fils Benoît, lui aussi avocat, va se retrouver face au clan Schreck, seul». Et il n’est pas certain qu’il échappe à la vengeance, car « à Draguignan, ajoute-il, les affaires se règlent à la table familiale, et quand la famille décide d’éliminer un rival, elle ne fait pas dans la dentelle ».
La suite de l’affaire lui donne raison : ce vendredi, alors que plusieurs avocats se sont rassemblés sur les marches du Palais pour soutenir les magistrats pris pour cible par le Rassemblement National, Me Jérôme Brunet-Debaines manquait à l’appel. Une absence excusée, précise Var Matin. Un pas de côté, donc, officiellement neutre. Mais Draguignan, personne n’est dupe : dans cette ville, où l’on pèse chaque geste comme une pièce d’échec, où chaque mot est pesé, on se demande si ce silence n’est pas, au fond, une réponse habile. Une esquive pour ne pas froisser, ne pas déranger, ne pas se mouiller, bref, rester à l’abri.
Article modifié le 31/03/2025 à 22h40 et le 05/04/2025 à 17h16