EXCLUSIF. Le Correspondant a retrouvé l’une des victimes de Patrick Salameh, l’unique tueur en série du Sud Est de la France : Soumia El Kandadi, jeune prostituée, torturée pendant 6 heures entre les griffes du sadique. C’est son témoignage, qui a permis aux policiers de résoudre l’une des principales affaires criminelles de ce début de XXIème siècle en France. Jamais, auparavant, elle ne s’était livrée dans la presse.
Entre mai et octobre 2008, quatre femmes ont disparues à Marseille, dont une étudiante (Fatima, en mai 2008) et 3 prostituées (Irina, Cristina et Zineb, en octobre et novembre 2008). Aussi, la presse a-t-elle surnommé le tueur, « Le Barbe bleu du trottoir” ou « Le Jack l’éventreur de Marseille ».
Pour percer le mystère de ces disparitions, craignant les agissements d’un tueur en série, qui pourrait poursuivre son œuvre machiavéliques, les policiers commencèrent, en novembre, à interroger les proches des 3 prostituées.
C’est ainsi qu’ils ont été amenés à interroger une autre jeune femme d’origine marocaine. Soumia, alors agée 24 ans, leur livre un témoignage capital : en septembre 2008, 10 jours avant la disparition de la première prostituée (Irina), elle se souvient avoir été “abordée dans la rue, par un client qui lui a proposé 400 € pour le suivre chez lui”. La somme est importante, pour une seule passe !
De plus, l’homme a l’air gentil et doux ! Mais arrivés chez lui, le chaton se métamorphose en fauve : Soumia est ligotée, bâillonnée, frappée, torturée et violée. Mais Soumia refuse les rapports sadiques. Elle veut déjà fuir et s’enfermer dans la salle de bain. Mais là, dans la baignoire, elle découvre le cadavre nu d’une femme, le regard fixant le plafond et sa chevelure retombant sur le visage.
Qui est cette victime ? Elle ne peut-être aucune des trois prostituées, elles n’ont pas encore disparues. Serait-ce Fatima, l’étudiante disparue en mai 2008 ? Peu probable : l’été étant passé par là, le corps devrait être en très piteux état, voir totalement décomposé. Alors, y aurait-il une 5ème victime ? L’hypothèse est loin d’être sotte. Mais qui ? “Se pourrait-il que ce soit Fatima et que Salameh ne l’ai tuée que plusieurs semaines après l’avoir kidnappée ?”
C’est ce qu’imaginait Soumia, peu avant qu’elle ne soit traînée de force dans la chambre, là où Salameh se fait de plus en plus menaçant: « Voila ce qui arrive aux filles qui me résistent. Ce n’est ni la première, ni la deuxième… Il y en a d’autre en bas », lui a-t-il dit en désignant les caves.
Soumia, habituée aux violences, y compris sexuelles ( ses 1ers viols, elle les a subis tous les jours dès l’âge de 6 ans, par un de ses frères et par un oncle, dans la maison familiale, à Rabat au Maroc), décide de tout accepter et de satisfaire tous les fantasmes de Salameh. Six heures durant, elle a subit viols sur viols. Jusqu’au petit matin.
Sa ruse et son abnégation ont payé : le lendemain matin, le tortionnaire, rassasié, accepte de la raccompagner sur son lieu de prostitution, sur un boulevard très fréquenté de Marseille. Sans oublier de menacer : « Si tu parles, je te retrouve et je te tue ! »
Soumia choisit de se taire, même face à son souteneur de mari ! Et ce n’est que lorsque les policiers l’interrogent, dans le cadre de a disparition de ses trois « collègues d’infortune » ( Soumia était proche de Zineb), qu’elle accepte de se libérer de son fardeau !
Guidés par Soumia, les enquêteurs découvrent l’antre du violeur, à Marseille. Sur place, la police scientifique et technique recueille des indices : vêtements, sac, bijoux, ADN qui, tous, ont appartenus aux 3 prostituées disparues .
A partir de là, Patrick Salameh ne peut nier les avoir rencontrées et avoir eu des rapports avec elles dans cette garçonnière, alors que marié et père de famille, il mène sa vie maritale dans un autre appartement, non loin de là. L’homme est déjà connu des forces de l’ordre : il a déjà été condamné à 20 ans de réclusion pour des braquages, des actes de barbarie et abus sexuels. Mais là, il affirme que les 3 disparues ont quitté son domicile en bonne santé, après avoir exercé leur métier ! Est-ce vrai ?
Une seule chose est certaine : on n’a jamais retrouvé aucun des cadavres de Fatima, Irina, Cristina et Zineb ! Pourtant, tous les terrains appartenant à Salameh et a ses proches et tous les lieux accessibles dans le coin ont été passés au peigne fin!
Le témoignage de Soumia ? Salameh l’écarte d’un revers de la main : « C’est un tissus de mensonges ! ». Mais policiers et magistrats le prennent au sérieux. «C’est grâce à elle qu’ils ont découvert la tanière du fauve ! Soumia n’a pas fait d’erreur. Elle y était donc bien venue, elle dit vrai !».
En l’absence de corps et de preuves formelles de meurtres, les procès de Salameh ( en 2014, 2015 et 2016) ne reposèrent que sur les propos de Soumia. Ainsi, Salameh fut-il, à 2 reprises, condamné à une peine de prison à perpétuité, assortie de 22 ans de sûreté.